1. Locations

Érenlande du Centre

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Présentation

Les terres situées entre les mers d’Eredane – la mer de Pellurie et l’Ardune, de moindre étendue – forment un ensemble de plaines immense et majoritairement inhabité. Sa partie ouest, qui borde la forêt d’Erethor, est boisée par endroits et sillonnée de petits cours d’eau. Plus à l’est, le sol riche de la haute prairie cède peu à peu la place au substrat rocheux à la végétation chétive des contreforts des Kaladrunes. L’Eredane centrale est baptisée noriam kedunni, soit « terre des nomades » en langue halfeline.

L’herbe pousse très haut dans cette région avec, çà et là, des oasis naturelles ombragées par les panocks. Ces îlots de vie, où l’eau abonde, attirent une foule d’espèces  animales, dont nombre de petits prédateurs. Les hardes de boros qui paissent dans la région sont suivies dans leurs migrations saisonnières par des troupes de fauves des hautes herbes.

Les plaines centrales jouissent d’un climat sec tout au long de l’année hormis au début du printemps, lorsque les pluies reverdissent la prairie et font éclore les fleurs  sauvages. Les halfelins appellent ce phénomène feyon ferran ou « temps de la renaissance ». La mi-été voit l’herbe jaunir puis virer au brun. Les bourrasques de l’automne soulèvent des nuages de poussière mêlée d’herbe sèche coupante.

Ces tempêtes très mobiles sont un danger pour le voyageur, sans compter que le passage d’un cavalier, ou même d’un piéton, se repère à des kilomètres quand la terre est sèche.

Les hivers sont froids ; il n’est pas rare que les pluies du printemps soient précédées d’averses de grêle.

Histoire

Les grands événements de l’histoire ne se sont jamais déroulés sur la plaine centrale, tout au plus les protagonistes ont-ils emprunté ses routes poussiéreuses. L’immensité herbeuse a vu défiler – et souffrir – toutes les armées d’Eredane. Quand l’envahisseur dornien remonta l’Éren, il repoussa les halfelins lors de son inexorable avancée. La guerre contre les fées inonda la plaine de sang et de mort. Puis ce furent les Sarcoséens qui traversèrent la prairie au galop, combattant les elfes avant de conquérir la Dornlande. Les chevaliers dorniens marchèrent ensuite vers le sud afin de joindre leurs forces aux Sarcoséens contre le Vieil empire. À la fin du Troisième Âge, enfin, les légions d’Izrador déferlèrent sur les plaines sans défense, laissant derrière elles un sillage de désolation.

Quand les halfelins découvrirent la prairie centrale, ils festoyèrent d’un gibier abondant sur un territoire que ne revendiquaient ni les autres fées ni les humains. Leurs petits villages de fermiers et leurs camps nomades vivaient en harmonie avec la nature environnante dans cette paix des premiers temps. Les invasions successives des Dorns et des Sarcoséens vinrent briser cet équilibre et dispersèrent le petit peuple. Alors que les guerres ne cessaient jamais tout à fait, de longues périodes de prospérité ne suffirent pas à restaurer la confiance entre humains et halfelins : c’en était fini pour toujours de la paix idyllique.

Le petit peuple reprenait le cours de son existence dans les hautes plaines après chaque invasion, un peu plus inquiet que lors de la trêve précédente. Puis vint l’invasion d’Izrador et de ses séides. Réduits en esclavage, les halfelins durent renoncer à leurs villages et à leurs terrains de chasse ancestraux. Les rescapés trouvèrent refuge sur les lisières orientale et occidentale. Ces fuyards vivent désormais coupés les uns des autres par la vallée de l’Éren et les légions de l’Ombre qui y patrouillent. Quelques tribus modestes continuent à mener une vie pastorale errante sur les collines de l’est tandis qu’une poignée de villages s’est établie dans la savane isolée au sud-ouest. Ceux qui n’ont pas fui ont été capturés par les esclavagistes gobelinoïdes et contraints de servir l’Ombre, de la mer de Pellurie à la mer Kasmael.

Une nouvelle peuplade s’est établie sur ces terres centrales. Si le pays a été vidé de ses halfelins par les seigneurs de guerre orcs et les légats, les Érenlandais, moins suspects à leurs yeux, abondent dans la région. Ils ne sont ni brisés comme les Dorns conquis ni rebelles à l’ennemi occupant comme les Sarcoséens ; l’unique but des enfants d’Érenlande consiste à survivre sur les terres désertées par les halfelins. Ce peuple travailleur et robuste vit du mieux qu’il peut sur ces étendues conquises.

Population

De très nombreux halfelins connaissent une existence misérable d’esclaves aux mains des serviteurs d’Izrador. Ils vivent ainsi depuis la conquête du sud, voici près d’un siècle. Contraints aux travaux forcés, victimes de malnutrition et de violences gratuites, ils sont sous la menace constante des maladies et de châtiments allant jusqu’à la mort. Le destin des captifs halfelins est possiblement la conséquence la plus horrible de la guerre totale menée par l’Ombre. Ces souffrances ont lieu pour l’essentiel plus au nord ou au sud, où le petit peuple a été déporté. Sur les quelque cent soixante mille esclaves halfelins d’Eredane, seuls trente mille vivent encore dans les plaines centrales, dans les campements et les avant-postes des orcs.

Dans la savane au sud-ouest, vingt-cinq mille halfelins libres résident encore dans de petits villages en lisière de l’Erethor, vivant de la terre ou de l’élevage de boros et de moutons. Leur mode de vie traditionnel étant un défi à l’Ombre, ils sont régulièrement victimes de pillages et de raids esclavagistes, même si les puissants magiciens, ensorceleurs ou druides qu’ils comptent dans leurs rangs permettent à certains hameaux de demeurer invisibles aux légions d’Izrador.


Dans les plaines de l’est, là où débutent les contreforts des Kaladrunes, de nombreuses tribus halfelines perpétuent le mode de vie nomade, sillonnant les collines avec leurs troupeaux et chassant le gibier sauvage. Leur sécurité repose sur leur déplacement incessant et le peu de traces qu’elles laissent dans leur sillage. Quinze mille halfelins vivent ainsi.

De nombreux humains habitent les plaines centrales. Les Érenlandais sang-mêlé sont les plus courants, regroupés dans de petits villages agricoles perdus dans les hautes herbes. Parmi eux vivent aussi maints Dorns ayant fui les légions d’Izrador. L’effectif total représente deux cent cinquante mille Érenlandais et cinquante mille Dorns.

Implantations

Le village halfelin traditionnel, unique en son genre architectural, a presque aussi peu d’impact sur l’environnement que les villes dans les arbres propres aux elfes. L’habitat est à demi enterré avec une ossature en bois qui soutient une toiture naturelle. Sols et parois sont tapissés de galets ou de terre cuite. Portes, volets et autres éléments de mobilier sont le plus souvent en cuir de boro travaillé par les meilleurs artisans du petit peuple.

Les jardins ensorcelés fournissent à chaque maisonnée une ample récolte de légumes tandis que, dans les champs environnants, poussent les épices, herbes et le tabac que les halfelins échangent en secret avec les elfes ou, parfois, avec les gnomes. Les ruisseaux voisins offrent l’eau nécessaire à l’usage domestique, au bétail et à l’irrigation. Les déchets compostés fournissent de l’engrais, les bouses séchées servent de combustible quand les pierres d’âtre font défaut.

Le bétail vaque librement, sans entraves ni enclos, sous la surveillance de wogrens qui veillent à ce qu’il ne s’éloigne pas trop et qui tempèrent les ardeurs des chats des hautes herbes et autres léopards.

Les halfelins nomades de l’est résident dans d’astucieuses tentes qui les protègent du froid, du vent et de la pluie aussi bien qu’une maison en dur. Ces abris sont spacieux au regard de leur petit gabarit avec maints espaces de stockage sous forme de poches ou de filets et un sol tendu de fourrure qui fait office de couchage moelleux. Faciles à monter comme à démonter, ces tentes, une fois pliées, se transportent aisément à dos de wogren.

Les bosquets de panocks forment le site idéal pour bivouaquer. Cet arbre trapu et buissonnant pousse dans les creux des prairies centrales. Sa canopée épaisse bloque le soleil comme le vent et ses branches, qui poussent comme autant de troncs secondaires, donnent le sentiment de contempler un boqueteau de cinquante individus formant un seul couvert végétal. Cette essence croît près des cours d’eau et abrite maintes espèces comestibles. Eau, abri et nourriture attirent le gibier, ce qui fait de ces bosquets de bons terrains de chasse.

Les villages érenlandais des plaines centrales sont un mélange architectural de maisons basses en briques, typiques de la tradition sarcoséenne, et d’ouvrages en calcaire propres au peuple dornien. Il arrive que des édifices typiques de chacune de ces deux cultures coexistent dans un même bourg, constituant des quartiers de styles distincts. Ailleurs, quand les deux cultures se sont mieux accommodées l’une à l’autre, les maisons mélangent les deux techniques : on trouvera par exemple une ossature en calcaire, dans le plus pur style dornien, mais recouverte de stuc sombre et décorée de mosaïques élaborées. Dans ces bourgs mixtes, les bâtiments sont ronds, de plain-pied et ouverts sur l’intérieur à la mode sarcoséenne, mais protégés par un mur d’enceinte et une douve, comme les villes dorniennes. Conçues à l’origine pour repousser les pillards orcs et gobelins, ces défenses protègent désormais des brigands humains, des Forcenés et des autres monstres qui sillonnent la plaine à la nuit tombée.

Cultures et pâturages ceignent la plupart des villes et villages d’Érenlande. Si cette agriculture abondante signifie que les humains d’ici vivent mieux qu’ailleurs, cela leur vaut aussi d’être plus lourdement taxés et victimes de raids plus fréquents.

Gouvernement

Les villages de paysans halfelins sont dirigés par un conseil d’anciens. Ce groupe, les duah ou « sages », décide de tout ce qui concerne la communauté dans son ensemble et s’efforce chaque fois de prendre en compte l’avis des plus jeunes. Devenir duah est essentiellement une question d’âge : s’il fallait, aux jours heureux, atteindre les cent vingt ans pour entrer au conseil, un village ne compte par les tristes temps qui courent qu’un ou deux individus de cet âge, les autres en ayant souvent à peine la moitié. Le travail et les ressources nécessaires sont l’affaire de tous. Cette solidarité élémentaire sert de socle à la société agraire halfeline depuis des millénaires, et même en ces heures sombres, le petit peuple reste fidèle à ses principes de vie.

Les halfelins nomades sont sous l’autorité d’un chef, le basra ou « guide ». Chaque année, la nuit de l’équinoxe de printemps, le basra en titre et ses concurrents éventuels entreprennent une éreintante série d’épreuves physiques, mentales et magiques, le sohal. Le vainqueur est désigné basra pour l’année qui débute. Le mode de vie nomade est rude, particulièrement sous le règne de l’Ombre. Il est de ce fait vital que la tribu soit guidée par l’individu le plus solidement trempé.

Les halfelins esclaves des séides d’Izrador sont régis par leurs maîtres maléfiques et soumis à des conditions de vie atroces. L’idée même de système juste et équitable dans un tel contexte est ridicule.

Les villages érenlandais sont eux aussi sous la coupe de gouverneurs fantoches, seigneurs de guerre orcs et autres légats tout-puissants. Dorns comme Sarcoséens songent que leurs cousins sang-mêlé doivent accepter la domination de l’Ombre sans réels regrets en raison d’un bagage culturel moindre. Rien n’est moins vrai : les Érenlandais, au contraire, sont les plus enclins à rejeter le joug du dieu déchu. Leur loyauté envers la couronne d’Érenlande, après tout, n’est pas diluée par une tradition antérieure ; il est même raisonnable d’affirmer que ce sont eux qui ont le plus perdu dans la chute du royaume.

La plupart des bourgs érenlandais sont de taille trop modeste pour qu’une garnison de l’Ombre s’y installe à demeure. Chargés d’organiser leur propre police, ils suivent souvent le modèle ancestral du shérif à la mode dornienne. Jadis, le poste, mêlant prestige et autorité, échouait traditionnellement à un membre d’une famille éminente chez les Dorns. Mais comme les Érenlandais font peu de cas des origines, les shérifs d’Érenlande sont plutôt désignés parmi les candidats populaires que parmi les aristocrates. Il en résulte des shérifs compétents qui, s’ils remplissent parfois leur charge à contrecœur, le font toujours en restant fidèles aux principes qui ont fait leur popularité.

Les shérifs érenlandais ont plus d’autorité que leurs homologues historiques. Ils supervisent la défense du bourg, l’allocation des ressources et tranchent la résolution des conflits. Beaucoup tiennent conseil avec un groupe d’anciens qui comprend les précédents shérifs encore de ce monde. La tradition stipule que tout adulte de la communauté a le droit d’être entendu par son shérif et qu’à tout moment, il est possible de revoter pour destituer un shérif ou le confirmer dans ses fonctions.

La méfiance propre au Dernier Âge

Aussi libres qu’ils puissent être de faire pousser leurs récoltes et de défendre leur village, les Érenlandais sont tenus de ne pas quitter leur communauté, ce que d’ailleurs, aucun ne fait à la nuit tombée sauf à être lourdement armé. Seuls les fugitifs aux abois voyagent seuls ou en petits groupes en Érenlande sans escorte d’orcs. Aussi, quand un étranger se présente aux portes d’un village érenlandais, la réaction est-elle encore plus vive que s’il s’agissait d’un cadavre ambulant. Morts-vivants, monstres et brigands sont combattus, parfois au prix du sang de quelques braves… mais frayer avec un fugitif, c’est courir le risque que tout le village soit passé au fil de l’épée, femmes, enfants et vieillards compris. Quelle que soit la réaction des villageois à l’arrivée d’un étranger, orcs et légats peuvent venir mener leur enquête et poser des questions auxquelles il n’existe pas de réponse recevable. D’où venait le fugitif ? Où allait-il ? Était-il armé ? Maniait-il la magie ? Répondre à ces questions, c’est avoir frayé avec un ennemi ; ne pas y répondre, c’est avoir fait preuve d’une négligence coupable. Et si par malheur l’inconnu s’est volatilisé, les séides de l’Ombre n’ont que les villageois sur lesquels passer leurs nerfs…

Religion

À l’image de leurs cousins danisil, les halfelins ne disposent pas de système religieux organisé et n’adressent pas de prières aux dieux, préférant vénérer les esprits de la nature qui influent sur leur vie quotidienne. Leurs ancêtres en appelaient aux esprits de la forêt pluviale ; ceux d’aujourd’hui, aux esprits de la plaine. Ces entités sont souvent considérées comme plus distantes que celles de la forêt, ce qui cadre avec l’immensité austère et battue par les vents des prairies centrales.

Les fermiers offrent leur propre sang aux esprits de la terre et, chaque printemps, dispersent les cendres d’un boro nouveau-né dans les hautes herbes. Ce sacrifice est voué à dissuader les esprits du pâturage d’empoisonner le reste du troupeau.

Les nomades vénèrent quant à eux les esprits des panocks en enterrant leurs morts au pied d’un boqueteau. Ces esprits-là sont censés les aider à chasser ainsi qu’à dissimuler leurs camps aux yeux de l’ennemi. Les chasseurs nomades apaisent en outre le courroux des esprits de la plaine en laissant un peu de sang et de chair sur le lieu où est tué le gibier.

Les Dorns ont depuis toujours le culte des ancêtres et les Sarcoséens possèdent tout un panthéon de cavaliers célestes qui prennent soin des disparus. Les Érenlandais, comme pour tout ce qui touche à leur culture, ont agrégé au fil des siècles le culte des ancêtres et celui du panthéon céleste. Ils ont su faire un tout des deux héritages culturels, s’attachant à la fois à respecter les valeurs ancestrales et à gagner l’au-delà.

Beaucoup d’Érenlandais sont convaincus que les esprits des défunts veillent sur eux depuis le ciel nocturne. Chaque acte qu’ils commettent, en bien ou en mal, sera pesé le jour où ils paraîtront devant leurs ancêtres afin d’accéder à cet au-delà étoilé. S’ils sont incapables de les aider directement, les défunts les conseillent par le biais de présages. Un enfant d’Érenlande décèle souvent un signe là où d’autres ne voient qu’un simple phénomène naturel.

Comme tous les humains, les Érenlandais incinèrent leurs morts. Ils ont par contre renoncé aux cercles des ancêtres du côté dornien et, pareillement, ne donnent pas les cendres à manger à leur cheval comme le font les Sarcoséens ; la coutume veut qu’ils les dispersent dans le champ familial, à la fois pour jouir de la bénédiction du défunt et pour fertiliser le sol.

Langues

Les halfelins parlent une langue qui, selon les érudits elfes, serait issue de celle des elfes danisil. Des accents distincts se sont formés chez les populations d’agriculteurs, de nomades et d’esclaves halfelins, mais que seul le petit peuple remarque. De nombreux halfelins, surtout chez les infortunés réduits en esclavage, parlent aussi un sabir mâtiné d’orc et de colonial. Il n’est pas rare qu’ils connaissent en outre un peu de haut-elfe, d’érenlandais et de langue du commerce.

L’érenlandais est un dialecte hybride né dans les plaines centrales, à mesure que les cultures dornienne et sarcoséenne se métissaient. Ce qui n’était au départ qu’un pidgin de nordien et de colonial a peu à peu acquis son statut de langue à part entière. Presque tous les Dorns et les Sarcoséens parlent un peu l’érenlandais, tout comme ces derniers possèdent des rudiments de nordien et de colonial.

Commerces et artisanat

Les halfelins forment un peuple astucieux qui n’a pas son pareil pour le travail du cuir et le tissage. Ces artisanats sont au cœur de leurs échanges depuis des millénaires. Grâce à l’or acquis en vendant bottes, selles, armures de cuir, étoffes, couvertures et vêtements, ils se procuraient des outils et des armes en métal.

Si le cuir de boro est la composante principale de leur artisanat, ils utilisent aussi la peau de chèvre, de lapin et de chat des hautes herbes. Le tissage emploie la laine de mouton, le poil de boro et certaines herbes fibreuses.

Le sel de la vie

Les fermiers halfelins étaient autrefois connus en Eredane pour leurs épices et leur tabac à pipe. La cuisine halfeline est encore plus relevée que son équivalent sarcoséen ; les herbes et mélanges aromatiques étaient un bien recherché. Quant à l’herbe à pipe que produisaient les fermiers du petit peuple, elle était prisée de Caradul aux  Kaladrunes. Le goût des diverses variétés allait du fruité, pour celle favorisant la digestion, au plus amer, pour celle aux vertus hallucinogènes, dont ses usagers affirment qu’elle permet de détecter les Égarés.

Ces produits phares de l’économie halfeline se vendaient dans toute l’Eredane. Cuir, textiles et biens agricoles ne sont désormais disponibles qu’en Erethor. Les artisans du petit peuple continuent à échanger avec les Danisil par le biais de caravanes discrètes qu’ils conduisent en lisière de la forêt pluviale plusieurs fois par an. Ils récupèrent ainsi outils en métal, pierres d’âtre, décoctions et de temps à autre un objet enchanté.

Agriculture

Si leurs ancêtres dorniens étaient des guerriers et du côté sarcoséen, des cavaliers nomades, les Érenlandais, pour leur part, sont des fermiers depuis toujours. Bien avant la chute du royaume, ils cultivaient la terre et élevaient du bétail, approvisionnant les grandes métropoles du sud. C’est ce qui leur vaut de survivre à l’heure du Dernier Âge.

La terre de l’Érenlande centrale, surtout près des rives de l’Éren, était autrefois la plus fertile d’Eredane. La région jouit d’un climat tempéré idéal pour les cultures et autres pâturages. Des siècles durant, les Érenlandais y cultivèrent blé, maïs, orge et, près du fleuve, riz, fruits et légumes racines. Ils élevaient boros, moutons, chèvres et cochons. Le produit agricole, non content d’alimenter une économie limitée, fournissait plus de la moitié des besoins en farines diverses et viande séchée des villes d’Alvedara, Cambrial et Sharuun.

Puis les légions d’Izrador – pour l’essentiel des orcs et des gobelins, avec quelques géants – déferlèrent vers le sud, détruisant tout sur leur passage et faisant main basse sur les réserves des fermiers en prévision de la guerre contre les fées. Assez d’Érenlandais survécurent toutefois, qu’ils se soient cachés ou rendus, pour que leur mode de vie reprenne et qu’ils repeuplent les zones anéanties. Pendant plusieurs décennies, ils labourèrent une terre ensauvagée, subsistant sur le peu que leur laissaient les  percepteurs. Un siècle s’est écoulé. La terre, enfin remise, permet aux paysans d’engranger quelque surplus. Le dur labeur qui a conduit à cette renaissance est à la fois le salut et la malédiction de ce peuple méritant, qui produit et consomme davantage que beaucoup d’humains en Eredane, mais vit sous la menace : combien de temps faudra-t-il aux agents de l’Ombre pour prendre conscience qu’ils peuvent leur voler beaucoup plus ? Si l’on se fie au passé récent, les percepteurs ne vont pas tarder à exiger toujours plus pour plaire à leurs maîtres, quitte à demander l’impossible. Les Érenlandais auront alors le choix entre se laisser saigner à blanc par les séides d’Izrador et voir leurs enfants dépérir, ou garder assez pour nourrir la famille au risque d’être passés au fil de l’épée.

Us et coutumes

Maintes traditions de l’Érenlande centrale remontent aux premières tribus halfelines qui ont vécu dans les plaines. D’autres datent des humains qui s’y installèrent par la suite.

La voie du wogren

Beaucoup d’humains les prennent pour de gros chiens et les elfes estiment qu’il s’agit de descendants des loups sanguinaires qui quittèrent l’Erethor pour vivre dans les grandes plaines, mais les halfelins savent ce qu’il en est vraiment. Les wogrens, affiliés aux esprits, ont choisi de vivre auprès d’eux pour éponger une dette d’honneur et d’amitié.

Une légende affirme qu’il y a fort longtemps, au Temps des années, Keela, mère spirituelle des plaines, fut attaquée par un zeedrith, entité maligne plus ancienne encore que les plaines elles-mêmes, chasseuse et grande dévoreuse d’esprits.

Utham, le Chasseur des hautes herbes, se jeta d’instinct dans la mêlée lorsqu’il fut témoin de l’attaque. Son petit gabarit et sa lance en bois suffirent à détourner l’attention du monstre. Keela profita de l’aubaine et tua le démon en le mordant à la gorge.

Mortellement blessé, Utham était perdu malgré les immenses pouvoirs de guérison de la mère spirituelle. Éperdue de gratitude, Keela porta le halfelin agonisant auprès de ses parents et pleura avec eux. Ses larmes se mêlèrent au sang d’Utham. De ces petites flaques de fluides vitaux nées du chagrin et de l’honneur jaillirent sept louveteaux moitié esprits, moitié créatures de chair et de sang.

Keela annonça à la tribu d’Utham que ces louveteaux étaient des wogrens, incarnations des esprits qui veillaient sur eux depuis l’aube des temps. Elle les pria de prendre grand soin des nouveau-nés et promit qu’à condition que les halfelins se montrent loyaux et aimants, comme Utham l’avait été envers elle, les wogrens seraient leurs meilleurs amis.

Que cette légende soit avérée ou non, les wogrens font partie intégrante de la culture halfeline depuis avant même le Premier Âge. On les prend souvent pour de gros loups alors qu’il existe des distinctions notables : le wogren est plus robuste et trapu, avec de plus grandes pattes, de plus gros yeux et une queue plus longue. Il possède une mâchoire surpuissante et des crocs impressionnants, sans oublier des griffes acérées qui se rétractent comme celles d’un félin.

Les wogrens sont les amis, alliés et serviteurs des halfelins. Ils jouent avec les jeunes et tiennent compagnie aux anciens, surveillent les troupeaux, protègent les villages des prédateurs et des séides de l’Ombre. Ils font office de montures, de messagers, d’éclaireurs et de chasseurs. Ils ne demandent qu’une chose à leurs maîtres : que ceux-ci se montrent aussi loyaux et amicaux qu’eux-mêmes le sont. Les halfelins, très imprégnés de cette culture de réciprocité, sont viscéralement attachés à leurs fidèles compagnons à quatre pattes.

Les wogrens vivent si longtemps que beaucoup les croient immortels. Une femelle ne met bas que deux ou trois fois par siècle et la naissance est fêtée comme un événement majeur au sein de la communauté. Un wogren n’est pas la propriété de son ami halfelin, mais son allié indéfectible ; une sorte de lien symbiotique s’établit entre l’animal et la minuscule fée. Dans chaque village indépendant ou tribu nomade vivent en général huit à douze wogrens adultes et deux ou trois jeunes. Il est fréquent qu’un wogren tisse des liens plus solides encore avec un halfelin donné, auquel cas le tandem devient inséparable. Si les wogrens sont libres d’aller et venir à leur guise, il est rare qu’ils voyagent au loin et ils sont toujours présents en cas d’alerte sérieuse.

Sous ses faux airs d’animal quelconque, le wogren jouit d’une intelligence supérieure et de sens quasi surnaturels, ce qui accrédite l’idée d’une créature apparentée aux esprits. Pourtant aptes à aboyer et à japper, les wogrens n’émettent presque jamais le moindre son et semblent communiquer entre eux par télépathie. Les halfelins qui les côtoient savent se mettre au diapason de leur humeur. Les wogrens, pour leur part, comprennent les halfelins à demi-mot et n’ont pas leur pareil pour décrypter leurs émotions.

La population wogren a grandement souffert pendant l’invasion. Tous les villages et tribus de halfelins réduits en esclavage vivaient sous la protection d’une meute de wogrens qui ont tous combattu jusqu’à la mort. Pour chaque groupe capturé, une meute entière a disparu. Les wogrens qui restent sont encore plus rares que les petits groupes de halfelins libres auprès desquels ils vivent.

Boros de somme

Le boro fut domestiqué par les halfelins voici très longtemps, et si le boro d’élevage est beaucoup plus docile que son cousin sauvage, il a gardé la force nécessaire pour servir de bête de somme. Les fermiers halfelins utilisent ces animaux pour labourer, tirer des chariots ou moudre le grain. Les nomades, quant à eux, recourent à un harnais élaboré pour suspendre un cadre en bois tendu de cuir entre deux boros. Ce palanquin permet de transporter charges et passagers lentement mais sûrement à travers l’immensité des plaines.

Un peuple de magiciens

Comme leurs cousins elfes, les halfelins sont un peuple intrinsèquement magique. Tous ou presque jouissent de capacités limitées leur permettant d’user de quelques tours de magie qui facilitent leur vie quotidienne, et certains deviennent même de puissants magiciens ou druides. Les halfelins d’autrefois étaient connus pour leurs expérimentations constantes dans le domaine arcanique. La grande variété de sorts élémentaires connus en Eredane est d’ailleurs due à cette longue tradition. Les plus doués ont pour habitude de prendre pour apprentis les individus présentant un fort potentiel. En leur enseignant les ficelles de l’art, ils s’assurent que leur peuple ne manquera jamais de magiciens capables.

Sous le règne de l’Ombre, l’omniprésence de la magie halfeline fait figure de menace tant elle suscite l’intérêt dangereux des légats d’Izrador. Nombre des plus puissants sortilèges lancés par les halfelins le sont dans le but d’occulter la magie de moindre importance afin d’échapper au flair de ces chasseurs de sorciers. Les wogrens sont en outre très sensibles à la présence des familiers des légats, ces étranges astirax qui redoutent les compagnons canins du petit peuple-fée. De ce fait, en l’absence d’escorte de poids, les astirax se tiennent à l’écart d’une communauté protégée par des wogrens.

La magie est également commune chez les esclaves halfelins. Tant qu’ils se cantonnent à des tours de magie et à des sorts mineurs, leur art passe inaperçu et contribue grandement à apaiser leurs souffrances. Il permet d’assainir leur pitance, empêche les plaies de s’infecter et protège les plus jeunes des assauts de la chaleur et du froid. Sans cette magie mineure, la vie des halfelins réduits en esclavage serait encore beaucoup plus courte et intolérable.

Plus que des remparts

Les orcs reconnaissent à contrecœur l’importance de l’agriculture érenlandaise. De ce fait, hormis lorsqu’il s’agit de châtier un fermier qui ne livre pas les quotas exigés, ils laissent les villages et leurs habitants en paix. Beaucoup de bourgs des plaines doivent en conséquence assurer leur propre sécurité face aux bêtes sauvages, bandits, Forcenés, démons et autres ennemis en maraude.

Pour se protéger, les villages d’Érenlande entretiennent avec soin les fortifications existantes ou s’empressent d’en bâtir. Une milice veille au grain depuis les remparts, composée de tous les villageois aptes au service. Les combattants s’entraînent régulièrement au maniement de l’arsenal disponible – hache, houe, bâton ou faux, voire à mains nues. Les vétérans forment les jeunes ; certains défenseurs parmi les plus aptes acquièrent même un vernis martial à force d’escarmouches.

Si les champs et les pâturages sont extérieurs aux ouvrages défensifs, tous les villageois vivent au bourg et quand une menace est repérée, les sentinelles sonnent le cor ou le carillon afin que tout le monde se mette à l’abri. Les enfants s’efforcent de reconduire autant d’animaux que possible avant que les portes se ferment tandis que les adultes prennent les armes. Une petite troupe, au centre du village, se tient prête à venir en renfort aux points chauds tandis que les jeunes remplissent des baquets afin d’éteindre un éventuel incendie.

Soumis à de fréquents exercices et toujours sur le qui-vive, les Érenlandais forment un peuple pragmatique, ouvert d’esprit et autosuffisant. Ils ont appris voilà des siècles qu’afin de survivre quand on n’est pas le meilleur, il convient de s’adapter aux défis et à la nature du terrain. Des principes qui s’avèrent précieux maintenant que l’Ombre les recouvre.

Le rassemblement des plaines

Les tribus halfelines avaient pour tradition de se réunir deux fois l’an aux équinoxes de printemps, durant l’arc de Doshram, et d’automne, durant l’arc d’Obares. C’était l’occasion de voir la famille, d’échanger des nouvelles, de courtiser, de partager le savoir magique et de célébrer les mariages. Ce rassemblement des plaines, comme on l’appelait, durait de nombreux jours. La fête attirait aussi les halfelins sédentaires.

Sous le règne de l’Ombre, le rassemblement des plaines est devenu un rendez-vous clandestin qui s’organise à n’importe quel moment de l’année par le biais de messagers discrets. Il se tient dans quelque coin reculé et ne dure qu’une poignée de jours. Le risque est certes élevé, mais sans ce rassemblement, c’est toute la culture nomade des halfelins qui est vouée à disparaître. Les alliances y sont consolidées, on s’y regonfle le moral et l’on y puise un sang neuf. Si les légions de l’Ombre venaient à fondre sur une telle assemblée, l’attaque pourrait signifier l’arrêt de mort du peuple libre halfelin.