Le Liteau est l’un des plus étranges royaumes proches.

Les change-formes ne le trouvent pas accueillant, mais il ne s’agit pas pour autant d’un microcosme dominé par la douleur et les tourments. C’est davantage un royaume où règne l’humilité et où, dépossédés de leurs pouvoirs et de leur intellect, ils deviennent des animaux traqués. Parfois, des anciens y envoient délibérément des jeunes pour qu’ils y apprennent d’importantes leçons. Assimiler ces leçons est le seul moyen d’en sortir : à moins qu’un change-forme soit capable de comprendre, d’accepter et de se réconcilier avec sa nature bestiale, il ne pourra pas partir.

Pénétrer dans le Liteau contraint immédiatement tout change-forme à adopter sa forme de lupus (ou l’équivalent). Les Garous se transforment en loups, les Corax en corbeaux, les Ananasi en colonie d’araignées et ainsi de suite. Leur mentalité devient également celle de l’animal concerné et tout processus humain de pensée est aboli. Même un Garou de race lupus, avec ses instincts animaux, se retrouvera handicapé une fois dépossédé de ses facultés supérieures. La personnalité et les habitudes du personnage, en revanche, resteront les mêmes : un Fils de Fenris conservera son expérience au combat et un Arpenteur Silencieux restera un vagabond. Non seulement les change-formes seront alors incapables de réfléchir comme un humain sans fournir d’effort, mais ils ne pourront plus appréhender pleinement les habitants « humains » du Liteau – ces émanations ignorantes de leur véritable nature.

Les esprits animaux du royaume peuvent communiquer entre eux et avec les change-formes. Ils se comportent comme la plupart des êtres vivants s’attendraient à les voir se comporter : les renards sont rusés, les lapins sont agités, etc. Les animaux domestiques, et particulièrement les chiens, sont par-dessus tout loyaux aux humains et les autres espèces les détestent pour cela.

Les animaux sauvages, ensemble incluant désormais les change-formes de passage, cherchent toujours à échapper aux chasseurs humains. Aucun d’entre eux n’arrive à comprendre pourquoi on les traite de la sorte. Tout ce qu’ils savent, c’est qu’on les traque à bord de monstres de métal volants et armé de tonitruants bâtons de feu infligeant douleur et mort. Parfois, ils se font capturer et on les met dans des cages nauséabondes pour plus facilement les torturer et les rendre malades.

Sous certaines formes animales, telles celles des Corax et des Ananasi, les change-formes sont presque en sûreté dans ce royaume. Le plus souvent, ils se préoccupent principalement de leurs prédateurs naturels, de la cruauté des enfants ou des fumigateurs. Les Nâga s’efforcent avant tout de rester hors de vue des humains, que la peur est susceptible de faire agir violemment. Dans la pénombre, les loups-garous pourraient éventuellement passer pour des huskies ou des bergers allemands – tout dangereux qu’ils soient, les humains ne sont pas si malins que ça – et finir à la fourrière s’ils se font attraper.

D’autres change-formes, en revanche, n’ont pas les mêmes facilités. Les Gurahl sous forme ursine, traités comme de véritables dangers dans les zones dites civilisées, sont des cibles de choix pour les chasseurs forestiers. Les Mokolé peuvent parfois se soustraire aux regards dans les égouts de la Ville, mais restent le plus souvent à la Campagne. Quant aux Rokea, faute d’accès à l’océan, ils doivent adopter leur forme de requin-bouledogue afin de pouvoir survivre et se nourrir dans les lacs ou les cours d’eau douce de la région.