« C’était en plein
Numismate, les trois fiers patrouilleurs de la commandeure Claudius se
dirigeaient vers La Traverse, pour se rendre en direction de Port-Salin. »
Nous nous étions croisés sur cette route qui mène au Sud, et Isac l'eressien s'approcha de moi pour me proposer de les accompagner. Même si Rhaja
et Or’Ey n’étaient pas d’accord, j’acceptai tout de même. Il m’avait présenté à
ses camarades, Archibald l’alchimiste et Norrig la druide.
Face à cette
étendue de verdure, le trio traversait une vaste lande. Archibald demanda à
Norrig de se transformer en oiseau. Pour survoler le paysage et dire ce qu’elle
y percevait... mais la métamorphe n'apprécia pas la remarque, et le lui fit
comprendre. Alors ils continuèrent de marcher...
Quelques heures plus
tard, le paysage changea pour laisser entrevoir des marécages et des forêts.
Ils s'arrêtèrent finalement à un croisement. Ou plutôt une patte d'oie...
À gauche : La Traverse
! Qui les mènerait à Port Salin...
À droite : un village
qui avait connu des jours meilleurs...
... et au milieu de cette bifurcation se tenait... ou
devrais-je dire "tentait de se tenir"... un écriteau en piteux état.
Isac le pistolero s'en approcha pour nous le lire :
« Venez donc regarder l’affrontement dans notre arène de combat entre "Ratatouille, le rat sanguinaire" et "Petra la cornue", une gladiatrice légendaire ! »
Le trio se mit à
réfléchir sur la direction à prendre. Vers La Traverse ou vers le village pour
voir le combat ?
Pendant qu'ils se
décidaient, les esprits et âmes égarées dans les parages s'étaient mis à
témoigner des lourds combats qui avaient eu lieu quelques jours ou quelques semaines plus tôt.....
La notion du
temps est devenu un concept bien différent depuis leurs passages vers l'autre
monde...
Des troupes étaient
passées par ici en direction de La Traverse. Il y avait eu d’énormes
affrontements, féroces et brutaux ! Des pas très lourds avaient écrasé des
cailloux et des pierres ! Des pas qui n'étaient probablement pas humains et
des restes de campements jonchaient le sol un peu plus loin.
Furtivement,
l’aura d’une âme s’estompa, plus loin, vers les marécages. Tandis que nous nous
dirigions vers elle, Archibald se plaignit de l’état de la route et osa
demander à la druide de se transformer en cheval pour le porter. Ce à quoi,
elle lui rétorqua de se souvenir de ce qui était arrivé au dernier
cavalier sur son dos… Alors ils avaient recommencé à se chamailler. Mais ce fut
de courte durée... car une voix leur parvint de la forêt...
- Haha mon p’tit gars ! Je t’ai retrouvé !
C’était une voix grave de
prédateur ! Mais les valeureux patrouilleurs ne se laissèrent pas
impressionner si facilement. La norroise métamorphe s’élança en prenant appui sur le
sol, bondit pour déployer ses ailes et s’envola. Elle attira
l’attention des patrouilleurs, et Isac s’était mis à cligner des yeux pour
communiquer avec elle, apprenant ainsi qu’il y avait bien quelqu’un dans les
parages.
A nouveau, la voix se fit
entendre... et les patrouilleurs aperçurent une fée sombre. C’était donc lui...
qui parlait avec un sidhe, ou du moins ce qu'il en restait...

Quelque peu perturbée par
le monologue de l'orque, je lui demandai de poser la tête de la fée avec
qui il conversait. Il est vrai que de l'avoir vu parler avec elle, sans le corps qui va avec, était déstabilisant... Il obtempérera, sans le
moindre signe d'hostilité, et nous invita à le rejoindre autour de son...
repas. Des morceaux de viande crues ! Ayant compris d'où provenait cette
nourriture, nous déclinâmes poliment, tandis qu'Archibald prit l'initiative de
lui vendre du feu pour 5 Po, afin qu'il puisse manger un repas décent, cuit et
chaud... L'orque accepta, et commença à nous parler de lui. Il s'appelait Tayo et pourchassait ce sidhe depuis fort longtemps. Il l'avait traqué à travers
les plaines et les forêts, les montagnes et les rivières, pour assouvir sa
vengeance. Il était très ému de pouvoir partager tout ceci avec
nous. Il convainquit les patrouilleurs, qui souhaitaient continuer leur
chemin, que ce sidhe méritait son sort... alors Archibald indiqua qu'il fallait
enterrer dignement ce pauvre sidhe, avant de repartir. Une forte émotion
m'envahissait à cet instant, et me poussa à lui dire que NON, il ne fallait pas
l'enterrer ! Ce n'était pas le souhait du sidhe qui lui, acceptait son triste
sort. Cette traque était justifiée et il confirmait les propos de la fée
sombre. Pour que son esprit puisse être libre et rejoindre les étoiles, Tayo
devait finir ce qu'il avait commencé. Ce n'est qu'après quelques hésitations
que les patrouilleurs reprirent leur chemin, laissant l'orque à nouveau en
tête à tête avec le sidhe...
Bien après avoir quitté
l'orque, des palissades en très mauvais état se dessinèrent à
l'horizon. Au-dessus de ces barrières dégradées pointaient les toitures de
quelques maisons fortement endommagées, spectatrices des autres foyers
tombés en ruines. Bien qu'estompée, une odeur de vieil incendie emplissait
encore l'atmosphère du village. Le centre de la ville laissait sa place à une
arène de fortune, creusée et délimitée par un grillage tout aussi dégradé que
le village lui-même. Autour de cette arène, on pouvait apercevoir une
vingtaine de personnes, à proximité d'un petit marché... constitué d'un
unique vendeur de légumes ! Au loin, un vieil homme se précipita vers nous pour nous pour nous accueillir, en vantant les mérites de son
arène. Il tentait surtout de nous convaincre que c'était le combat qu'il ne
fallait pas rater... Pendant que Norrig bougonnait dans un coin, Archibald pris
les devants en se présentant. Il montra un vif intérêt pour le combat et proposa
de sponsoriser l’évènement. L’homme accueillit son offre à bras ouvert et se
présenta sous le nom d’Armentio Artavius, bourmestre de la ville.

Il invita notre équipe autour d’un
repas et indiqua qu’un certain Coliseus Regulus, un marchand qui appréciait les
combats de gladiateur, allait arriver sous peu afin d’assister à l’évènement,
et peut être investir, lui-aussi.

Curieux d’en savoir plus
sur cette confrontation, Archibald demanda des renseignements, notamment
au sujet du fameux « homme rat », mais au final ce n’était qu’un
vieux rat. Archibald lui proposa une
solution : créer un combat qui attirerait vraiment les foules, un combat
impressionnant, avec des feux d’artifices pour le show, et de la musique. Une
grande fête ! Il parla d’un grizzly, proposition qui effraya quelque peu le bourgmestre. Face
à cette réticence, Archibald lui expliqua que Norrig pouvait se transformer en
animal et qu’avec Petra la Cornue, les deux combattantes s’entraineraient à faire
« semblant de se taper dessus ». Une sorte de catch, avait-il dit.
Plus emballé par cette idée, Armantius demanda à ce que Norrig se
transforme en … dragon ! Mais comme elle n’en avait jamais observé, elle lui indiqua qu'elle ne
pouvait pas le faire. Le bourgmestre accepta le marché de l’alchimiste, pour lequel 20% des profits des combats reviendraient à la patrouille de la
Commandeure Claudius.
Le mot patrouille avait
quelque peu délié la langue de cet homme. Il raconta avoir discuté avec des
voyageurs d’Argefaille, qui avaient rencontrés des patrouilleurs l’année précédente.
Norrig tenta de récupérer plus d’informations mais le vieil homme était nerveux
et stressé. Il se demandait si les patrouilleurs pouvaient s’occuper des ogres du clan des Mains de Sang, qui avaient attaqué son village quelques semaines
plus tôt.
Pendant que la druide
continuait de parler avec lui, Isac et Archibald s’étaient éloignés pour
regarder une statue, couchée sur le sol. L’alchimiste trouva une forte
ressemblance avec Isac. Le pistolero refusait de se faire passer pour cet
inconnu, qui semble-t-il était un héros aux traits eressiens, ayant combattu
contre une féroce créature pour libérer la région. Un gamin leur dit que
cette statue avait au moins 25 ans (mais comme il n’était pas encore né, la
véracité de cette date n’est pas certaine).
Isac passa pas mal de temps à dire aux gens que ce n’était pas lui et qu’il ne savait pas s’il
s’agissait de quelqu’un de sa famille. Les villageois commencèrent à
fabuler sur ses origines, en imaginant un frère jumeau ou un descendant, ou qu’Isac faisait partie d'une ancienne prophétie qui racontait que le héros reviendrait les sauver pendant les heures les plus sombres.
Plus tard dans la soirée,
le bourgmestre invita les patrouilleurs autour d’un repas, en compagnie de
Petra, de l’entrepreneur Coliseus Regulus et de sa garde du corps Livia.

Archibald profita
de ce diner pour parler de son idée de catch. La gladiatrice allait se battre
contre Norrig la grizzly, en donnant des coups chorégraphiés pour faire croire
au public que le combat serait vraiment dangereux. Il voyait cela comme une fête,
avec un solo de percussion et un feu d’artifice. Coliseus se montra très
intéressé et demanda son avis à Livia (la guerrière était restée silencieuse en
regardant les patrouilleurs). De toute évidence, elle n’appréciait pas leur
présence et ne s’était même pas cachée pour le montrer. Elle indique que
son nom était mal perçu à cause des patrouilleurs, pour lesquels elle semblait garder beaucoup d’animosité. Selon elle, ils n'étaient que des opportunistes qui avaient fait tomber
son nom en disgrâce.
Ce nom était aussi celui
du dernier satrape : Aurelius !
Le lendemain, les
patrouilleurs mirent à profit leur temps libre pour préparer les
réjouissances à venir. Alors qu’Archibald s'en retourna au Promontoire pour
annoncer les jeux de la Traverse, Isac avait suivi Norrig dans la forêt. Attirés par un bruit après quelques heures, il leur sembla qu'un animal leur tournait autour. Sa
silhouette se déplaçait furtivement mais le craquement des brindilles les avait
alertés. Prêt à se défendre, Isac sorti son arme, alors que surgissait un énorme animal
ailé à tête d'oiseau, qui menaçait en grognant les patrouilleurs. L'instinct de
chasseur d'Isac brilla dans son regard. Imaginant déjà le trophée que
représentait ce griffon sauvage, il leva son arme et prépara son tir.
L'alignement était parfait. Il ne lui manquait plus qu'à presser la détente...
... Une main entra dans
son champ de vision et se posa sur le canon. La druide baissa avec délicatesse
l'arme du pistolero. Elle l'empêcha d'attaquer l'animal affamé, et proposa de
lui donner ses rations pour qu'il s'en nourrisse. À contre-cœur, le chasseur obtempéra
et la laissa faire. Elle s'approcha de la créature pour lui tendre
un peu de nourriture. D'abord méfiant, le griffon saisit brusquement les
rations dans la main de Norrig, sans chercher à l'agresser. Un pincement sur sa
main lui arracha tout de même un cri de surprise et des détonations avaient
déchiré le silence de la forêt. Isac avait réagi pour protéger la druide en
vidant son arme. Le bruit avait surpris tout le monde, et chacun avait reculé
d'un pas. Les patrouilleurs avaient profité de la situation pour se mettre en
place et encaisser une attaque du griffon. Mais c'était trop tard. L'animal
s'était emparé des rations et fuyait déjà en s'enfonçant dans la forêt.
Trois jours après cette
péripétie dans la forêt, Archibald était revenu avec beaucoup de monde. Norrig
et Petra avaient passé leur temps à préparer chaque mouvement de leur combat et
Isac avait préparé un discours de présentation, que lui avait demandé
l'alchimiste.
Plutôt mal à l'aise au
début, Isac annonça chaque étape de l'événement, en commençant par mon solo
de musique. Je profitai de mon djembé improvisé pour jouer de la musique et
raconter une histoire de mon village. Les gens apprécièrent mon spectacle, et n'attendaient plus qu'une chose : le duel.
Isac invita la foule à
acclamer « Norrig, la fille de la nature » et « Petra la Cornue » ! Les gens exaltaient d’impatience et applaudissaient l’entrée des
guerrières :
D’un côté, Petra
brandissait une lourde épée étincelante (émoussée, pour ne pas risquer de blesser Norrig - mais le public ne pouvait pas le savoir car l’illusion
était parfaite).

De l’autre côté, Norrig, sous sa forme humaine, exagérait son côté druidique et sauvage pour impressionner le
public. La norroise tournait en rond dans
l’arène, pareille à une lionne en cage.
La gladiatrice donna le
signal à Norrig en balayant la distance qui les séparait avec son épée. La
norroise fit une roulade pour se transformer soudainement... en grizzly !

Menaçant
et agressif, l’animal s’était dressé sur ses pattes dans un rugissement bestial.
Des acclamations de stupeur s’élevèrent de la foule. Les combattantes
s’affrontaient dans un combat acharné, des coups d’épées par-ci, des coups de
pattes par-là. Les échanges s’enchainaient de plus en plus vite, et de plus en
plus fort. Le combat s’intensifia jusqu’au moment où la druide réussit à
désarmer la vaillante gladiatrice. A mains nues, Petra fonça vers la grizzly
pour la bousculer… mais l’animal, ne cessa pas de rugir et de résister. Ses
babines retroussées laissaient échapper des filets de bave. Le casque cornu de
la gladiatrice tomba sur le sol et le public retint son souffle pendant
plusieurs secondes. Tombée par terre sous la puissance du grizzly, les
villageois commençaient à craindre pour sa vie. Alors Norrig tourna autour
de la combattante sans défense, ses épaules roulant sous sa fourrure. D’un
bond magistral qui souleva des nuages de poussière, l’animal se rua vers
elle. On entendait les gens crier et hurler. Effrayés par la scène qui se
déroulait sous leurs yeux, certains enfants s’étaient mis à pleurer. Des femmes
s’évanouissaient. Les hommes grondaient de colère pour que Petra se relève. La
poussière semblait prendre son temps avant de retomber, et seuls les cris de
Petra et les grognements de Norrig traversaient ce rideau opaque. Un
rugissement transperça le voile. Au summum du suspens, les villageois ne
savaient plus comment réagir. Certains hésitaient à rentrer dans l’arène pour
porter secours à la gladiatrice… Et le nuage retomba… Le grizzly était au sol…
Petra s’était relevée… Brandissant fièrement son arme dans un cri de victoire, son pied
posé sur la bête.
Norrig reprenait
doucement sa forme humaine lorsque Petra lui tendit la main pour l’aider à se
relever. Une acclamation de joie vibrait dans la foule qui se relâchait de la
pression du combat, dans une ovation tonitruante !
Pour clôturer le
spectacle, l’alchimiste Archibald mit le feu aux poudres. Une explosion de couleurs illumina le ciel, accompagnés de détonations rappelant la musique du djembé, une lumière pareille au discours d’Isac et les couleurs se mêlaient dans une
bataille pour posséder les cieux.
La fête battait son plein
et le bourgmestre ne cessait de remercier et d’acclamer la prestation des
patrouilleurs. Il était époustouflé par les ressources mises en place pour aider
son village et promit aux guerriers qu’ils seraient toujours les bienvenus chez
lui.
Au lendemain des
festivités, il fut l'heure pour les patrouilleurs de rentrer au fortin. Encore euphoriques,
les villageois saluèrent leur départ avec émotion.
Sur le chemin du retour, un
papier accroché à une branche attira l’attention des patrouilleurs. Lorsqu’ils
l’attrapèrent, une forte odeur de sel s’en dégagea…
Un pamphlet y était écrit
à plusieurs reprises :
"faites gaffe à Garf fils de Garf, faites gaffe à Garf fils de Garf, faites gaffe à Garf fils de Garf,
faites gaffe à Garf fils de Garf, faites gaffe à Garf fils de Garf, faites gaffe à Garf fils de Garf, ..."