Dame Kaede,
Sayonara.
Je commence cette lettre par ce mot car c’est de cela qu’il s’agit. C’est parce
que je vous aime et que je veux que votre idée de moi soit préservée que je ne
peux me permettre de vous faire face. J’ai conscience que je suis bien plus
égoïste encore que toutes ces fois où je vous cachais des choses pour ne pas
vous inquiéter.
Et j’y ai pensé justement. J’ai pensé vous cacher ce qui m’est arrivé et prétendre que tout était normal. Mais vous ne méritez pas cela.
Haïssez-moi ou
continuez donc de m’aimer malgré la souffrance que je vous inflige, cela
reviendra au même.
Car dans tous les cas, je suis désormais un fantôme invisible qui veille sur
notre famille.
En temps normal, le fantôme que je suis serait parti vers l’au-delà cependant
je ne peux pas m’y résoudre. Pas maintenant. Il me faut rester ici-bas encore
quelques temps avant de m’en aller dans les profondeurs, au Jigoku ou au
Gaki-do, là où l’on acceptera mon âme souillée. Je ne suis pas pressé de m’y
rendre cependant d’autant que j’ai entraperçu une possibilité bien réelle d’accorder
un avenir radieux aux êtres que j’aime.
Shiro, Ari et vous mon amour avez toujours été et êtes encore les lanternes de pierre qui guident ce qui reste de mon âme parmi ces ténèbres. Vous êtes le plus beau rêve que j’ai pu avoir au milieu de ce cauchemar.
Ma force de volonté est faible cependant car malgré ces adieux, j’aimerais continuer à vous écrire. Me permettrez-vous cet abus égoïste supplémentaire ?
Ikoma Takeo