En bordure de Charousse s’étend l ’immense forêt des rois de Montaigne. Ces terres ancestrales, qui constituaient le pavillon de chasse royal ainsi qu’un vaste domaine attenant, représentent désormais le centre du pouvoir montaginois.
Au cours du règne de Léon Alexandre, cet endroit est devenu le château du Soleil. Le pavillon principal possède plusieurs étages et semble s’étendre prodigieusement à mesure que l ’on s ’en approche. La maçonnerie magnifique présente des fresques vives et des lignes symétriques frappantes. De splendides sculptures, des fontaines raffinées et des jardins soigneusement entretenus entourent tous les bâtiments et les cours, formant un décor surréaliste. Cela donne aux visiteurs l ’impression d ’une extrême insignifiance comparés à la personne que le domaine incarne : l’Empereur lui-même.
Le coût de cet exploit architectural a été considérable, même pour les caisses montaginoises a priori infinies. Ce monument de la culture nationale a uniquement été rendu possible grâce à des armées d ’ingénieurs, de sculpteurs et de jardiniers, qui sont toujours à la disposition du maître des lieux. Mais si majestueux que soit l ’extérieur, l ’intérieur est encore plus impressionnant : chaque galerie et chaque pièce est décorée de meubles finement travaillés, de gigantesques peintures et fresques de plafond, ainsi que de sculptures décoratives si vastes et si détaillées qu’elles éclipsent les visiteurs. Les détails submergent tant les sens qu’il est impossible de repérer les complexes quartiers des domestiques ou de s’y orienter, ou même de remarquer les dits domestiques.
Les serviteurs empruntent des passages muraux labyrinthiques et des panneaux pivotants pour rester invisibles jusqu’à ce que leurs services soient requis. Les invités voient leurs verres remplis et leurs assiettes garnies comme par magie. Le flot d ’invités qui vient prendre part aux rassemblements, fêtes ou galas grandioses quotidiens est tout aussi phénoménal. La plupart espèrent faire bonne impression auprès du Roi-Soleil afin qu’il leur dispense richesses et faveurs.
L ’ambiance est plus calme lorsque Sa Majesté n ’est pas présente aux fêtes, prise par ses fréquents conseils et réunions. Si l ’Empereur apprécie quelqu’un, il le garde près de lui en lui attribuant des quartiers dans l ’enceinte du palais. Bien sûr, ce dernier ne possède qu’un nombre limité d ’appartements, et les faveurs royales peuvent changer sur un coup de tête : un tel peut un jour être dans les petits papiers du Roi, puis se retrouver dans une tout autre aile, ou pire, se voir refuser l ’accès au château du Soleil, dût-il tomber en disgrâce. De tels nobles sont généralement jeunes, riches, beaux et cherchent désespérément à se faire apprécier de l ’Empereur.
À ce jour, les bâtiments principaux et ses longs couloirs sont en service depuis plus de dix ans, mais le domaine ne cesse de se garnir d ’annexes. De nouveaux pavillons sont érigés pour accueillir une liste croissante de courtisans et de puissants ambassadeurs en visite à la cour du souverain. Les équipes d ’ouvriers ont leurs propres baraquements de bois, à l ’extérieur des portes auxiliaires du terrain de chasse. Une petite caserne jouxte chacun des portails et rejoint le bastion principal par un sentier de gravier bien gardé. La garnison de la Garde éclair de l ’Empereur opère depuis ces places fortes. Ils sont dévoués à leur tâche et valorisent plus que tout l ’honneur, le courage et le zèle.
La Garde éclair est composée de soldats d ’élite triés sur le volet et chargés de la protection de l ’Empereur. La sécurité du souverain ne quitte jamais leur esprit et leur cœur, et ils ne lui ont jamais failli. Des emplois du temps stricts et des rapports réguliers leur permettent d ’éliminer rapidement tout imposteur, empêchant une infiltration dans leurs rangs. Ils restent constamment aux aguets, à l ’affût des assassins et autres infâmes ennemis de Léon Alexandre et de sa cour, même si la plupart des invités ne s ’en rendent pas compte. Grâce à leur vigilance, les incidents dangereux sont rares à la cour, et lorsqu’ils surviennent, les gardes font justice rigoureusement et impitoyablement : l ’Empereur n’a aucun scrupule à exécuter ses ennemis pour faire une démonstration.