Vue de l’extérieur, la Montaigne est belle ; « parfaite », diraient certains. Les Montaginois l’appellent « la plus glorieuse Nation de toute la Théah ».
Ses terres sont giboyeuses, verdoyantes et luxuriantes. Son sol est fertile, ses montagnes riches en minerais et ses champs s’étendent sur des kilomètres. Ses cités ressemblent au Paradis même, et s’étendent si loin tous azimuts qu’il est impossible de les traverser à pied en un seul jour. Ses ports bourdonnent d’activité et d’échanges, et l’opulence de ses cours et de ses palais rivalise de loin avec tout ce que le reste de la Théah peut offrir.
Depuis le Détroit d'Avalon au nord jusqu’à la cité de Rogne au sud, depuis la Baie Écumante à l’est jusqu’à la cité marchande populeuse d’Arisent à l’ouest, la Montaigne est une Nation cultivée et civilisée. C’est également une terre d’abondance : la moindre acre de terre arable est cultivée jusqu’au moindre pouce, la moindre veine de minerai exploitable, si infime soit-elle, est extraite et fondue en fer et en acier, et tout bois pouvant servir à la construction est abattu pour laisser place à davantage de fermes.
Contrairement aux Castillians, qui ont bénéficié des conseils prudents de l’Église, les Montaginois n’ont pas épargné leur territoire, l’exploitant jusqu’à la moelle. Des savants de l’Église ont maintes fois averti les Montaginois des conséquences probables s’ils continuent de se refuser à ralentir la production et à laisser leurs terres en friche. Pour le moment, rien ne prouve que ces érudits soient dans le vrai, et la pression sur l’industrie résultant de l’effort de guerre a rendu les Montaginois d’autant plus sourds à ces avertissements.
La géographie de la Montaigne est variée : forêts massives, chaînes de montagnes et vastes plaines. La majorité du territoire est constituée de prairies planes adaptées à l’agriculture.
Le climat est tempéré tout le long de l’année, épargné par les températures extrêmes, la sécheresse ou autres dangers climatiques. Les températures hivernales vont rarement en dessous de zéro, et dans de nombreuses régions de la Montaigne, la température ne varie guère de plus d’une dizaine de degrés d’un bout à l’autre de l’année.
Des forêts de toutes tailles parsèment le paysage et quantité de rivières placides sinuent à travers la campagne. L’effet d’ensemble est enchanteur et intensifie l’atmosphère qui en captive tant. La capitale de la Montaigne, Charousse, est située au centre d’un immense bassin, à l’une des altitudes les plus basses de toute la Montaigne. Au sud-ouest, un dénivelé progressif crée un enchaînement de collines qui ressortent des pâturages gracieux, tandis qu’en direction de l’est, un homme peut marcher un jour, voire plus, avant que l’horizon ne change. La région possède des terres arables parmi les plus prisées de toute la Nation, riches en minéraux et en nutriments nécessaires aux plus belles récoltes qui soient. C’est également la partie la plus aisément défendable du pays, ce qui en fait l’emplacement idéal pour sa capitale.
À l’ouest de Charousse se trouve la chaîne de montagnes la plus imposante de la Montaigne, Les Sommets Blancs, dont les pointes neigeuses atteignent les trois kilomètres d’altitude. Le fleuve Sinueuse traverse la capitale, passe par le lac Sinueuse et se déverse dans la mer de la Veuve, fournissant une voie de commerce rapide aux autres Nations.
Au nord, Muguet est la cité portuaire la plus importante de la Montaigne, et sa province est probablement la plus connue de Théah. Il n’est pas rare que le duc de Muguet, Édouard Allais, fasse fi des conseils et même des ordres d’autrui, hormis ceux provenant directement de la lignée royale. Son attitude lui a valu la compagnie de Montaginois, et même d’étrangers, parmi les plus libertaires.
La province de Doré a acquis une réputation semblable du fait des initiatives de Pierre Flaubert de Doré, qui a récemment investi une fortune pour transformer les marécages entourant Pourisse en terres arables. Il est ainsi devenu, quasiment du jour au lendemain, le plus gros éleveur de bétail de la Nation. Ses bovidés rapportent à sa province des revenus sans pareils et Doré conteste la suprématie de Charousse sur le marché du bétail. À travers la Nation, courtisans et nobles ont ouvertement manifesté leur hostilité face à cette entreprise, mais la famille royale n’a pour le moment pas émis d’avis, probablement trop préoccupée par la mode pour s’intéresser au bétail.
À l’est de Charousse, au-delà des prairies montaginoises, on trouve le territoire eisenör acquis en vertu du traité de Weissburg : la forêt de Lock-Horn, dont le nom remonte à l’époque où l'Avalon occupait le nord de la Montaigne. Cette forêt s’est avérée une source précieuse de bois, même si les récoltes se payent à prix fort : parmi ceux qui ont arpenté l’ombre de ses frondaisons, plus d’une vingtaine de personnes (parmi elles deux sorciers Porté) ont disparu et ne sont jamais revenues. Au dernier endroit où on les avait vues, on trouva uniquement une série de traces de sang étranges qui remontaient le long de plusieurs arbres, jusqu’aux branches les plus hautes, puis s’évanouissaient.